mardi 12 février 2013

Raphaël MALLON


"L'oiseau dans l'oeil"
Aquarelle et encre de Chine sur papier
15 x 10 cm

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"Les oeuvres de Raphaël Mallon sont narratives comme celles rencontrées dans la bande dessinée contemporaine, mais avec une inventivité particulière et une obsession de la gémellité, à moins que ce ne soit celle du dédoublement intérieur. Dans son dessin riche et fouillé, apparaissent des individus à double tête, dont chacune garde une expression différente et qui dans certains cas on en commun une même bouche.  Cela serait-il le signe d'une certaine schizophrénie? Pas du Tout!


En effet si chaque individu présente des aspects multiples de sa personnalité, c'est qu'il existe toujours cette dualité entre l'individu qui regarde agir et celui qui agit. Mais elle s'efface apparemment en s'interpénétrant de façon harmonieuse la plus part du temps, et ce, durant une grande partie de l'existence. Par contre, à tout moment, la dissociation, le clivage entre ces deux nature du moi, peut se faire jour. Je pense qu'à travers cette accumulation de personnages, il y a une recherche prégnante sur l'identité supposée réelle de l'homme, comme du reste de celle de l'artiste. 


De la même manière, beaucoup de ses individus se courent les uns après les autres, comme s'ils voulaient se régler leur compte, à la recherche d'un confrontation finale espérant ainsi résoudre  leurs problèmes d'identité. Je crois qu'à travers cette oeuvre, on aura jamais vu autant qu'à notre époque parmi la jeune génération, une telle obsession de la recherche identitaire de l'homme dans le monde et de sa place dans le cosmos. Sans doute que les idéologies, les religions, ne remplissent plus leur rôle de garde-fou sécurisant, devant une constante et perpétuelle angoisse existentielle. Peut-être retrouve-t-on dans ces travaux , ce même état d'esprit qui semble avoir parcouru la pensée créatrice au Moyen-âge ou l'art évoluait entre l'angélique et le démoniaque. En effet, quelques uns de ces personnages pourraient se glisser, sans attirer l'attention, dans certains enfer ornant les chapelles  du XIIe et XIIIe siècle.


A 29 ans, Raphaël Mallon se présente comme un grand jeune homme sympathique que l'on vient juste de sortir de son rêve, appliqué qu'il est à toujours et toujours dessiner comme s'il fallait qu'en une journée il termine l'oeuvre de toute une vie. Dès que l'on amorce le dialogue avec lui, on le sent avide de communiquer et d'entendre toutes les réflexions que l'on peux porter sur son travail. Le moteur de son travail reste fonction avant tout de ses réactions par rapport à ce qui se passe dans la société qui l'entoure. En particulier toutes les agressions que subit notre environnement interpellent sans cesse sa sensibilité. Comme pour toute sa génération, on note une prise de conscience marquée face à tous les problèmes écologiques et la nécessité d'y faire face et de les résoudre de façon non violente. Aussi, ses dessins ne sont jamais le résultat de longues cogitations, mais simplement la traduction de réaction quasi épidermiques devant telle ou telle situation. 


La singularité aurait-elle ses circuits? Sans doute, parce que Raphaël Mallon fait référence à Gregona. Ils ont eu plusieurs entretiens et ce dernier lui a dit : "Attention ne te prends jamais pour un artiste et continue sans cesse de travailler !" Je crois que voilà deux préceptes que ce créateur semble suivre à la lettre. En effet, il parle de sa passion de l'art avec la modestie enflammée d'un artisan et non comme un être d'exception choisi par les Muses. Et ensuite, durant ce festival, je l'ai vu dessiner sans cesse avec cette application que l'on connaît aux musiciens qui inlassablement étudient une partition. J'imagine que bientôt, quand l'occasion se présentera, que son dynamisme et tout le devenir contenu dans ses oeuvres l'amèneront sur la voie des grandes compositions, que l'on peut pressentir dans quelques unes de ses oeuvres."


J.C Caire dans "Les cahiers" de François Ozanda

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